Le Focus de Ben Caudron: La vie de gourou n’est pas facile

Pas facile d’être un gourou, et encore moins de le rester. On ne devient pas gourou ainsi, sans autre forme de procès, non, on a besoin des autres.

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D’ailleurs, ce sont également ces mêmes “autres” qui vous retirent ce statut. Vous ne devez pas faire grand-chose: il suffit généralement de patienter deux ou trois mois, jusqu’à ce qu’un nouveau plat soit servi. Vous devez fameusement vous y connaître pour pouvoir y changer quelque chose: ainsi, il n’est pas donné à tout le monde d’ajouter systématiquement un chapitre supplémentaire à un livre, auquel un bandeau aux couleurs criardes peut être apposé, afin d’attirer une nouvelle fois l’attention.

Voici deux ou trois semaines, Ilona et moi-même nous sommes penchés sur un dossier pour une chaîne de librairies. Comme nous voulions les encadrer de la manière la plus large possible, nous sommes allés rechercher quelques gourous du moment. Notre attention a été tout particulièrement attirée par Chris Anderson, l’homme de la “long tail”.

Chris Anderson écrit des articles pour Wired, une revue qui peut se permettre d’approfondir de manière passionnelle des choses qui sont tout au plus une “tendance potentiellement intéressante” pour le reste du monde. Il ne faut dès lors pas s’étonner que Chris – fidèle à la tradition de cette revue – laisse libre cours à ses réflexions sur les conséquences de la distribution numérique sur le modèle commercial “normal”.

En résumé, Anderson affirme que le coût marginal de la distribution numérique fait en sorte que les fournisseurs de livres peuvent finalement s’adresser aussi à l’original, qui semble intéressé par des choses dont personne d’autre n’a jamais entendu parler. Si cela ne génère aucun coût supplémentaire de proposer ce titre obscur (parce que vous ne devez par exemple plus le stocker ni le mettre à l’étalage), pourquoi ne le feriez-vous pas?

La “long tail” d’Anderson est évidemment elle aussi un élément au marketing extraordinairement efficace. Titre sympathique, idée apparemment simple, et surtout: se prêter facilement “à une utilisation inappropriée”. Peu après la publication de son petit chef-d’œuvre, on a vu apparaître partout les “longues queues”. Les sous-gourous se sont épuisés dans des tentatives pour en démontrer la validité universelle.

Dès lors, nous ne devons pas non plus nous étonner qu’un jour le balancier ne penche dans l’autre direction. Ce moment semble à présent venu. La MCPS-PRS Alliance (une organisation non-marchande qui se consacre à récolter des royalties)  a fait savoir voici deux semaines par la voix de Will Page que la “long tail” ne fonctionnait pas. Les médias locaux ont sauté sur l’occasion pour relayer la nouvelle.

Et quel est l’argument déterminant pour cette affirmation audacieuse? La grande majorité des consommateurs semble toujours ne jurer que par les “big hits”. Ce qui me laisse sans voix! Anderson a-t-il jamais affirmé le contraire? Tout le modèle de la long tail ne repose-t-il pas sur la notion que la bonne vieille règle des 80/20 reste valable? Que 80% des consommateurs se satisfont de ce qu’ils trouvent dans 20% de l’offre totale?

“Pauvre Chris”, me dis-je alors... sans rien demander, tu as été porté aux nues, avant d’être ensuite voué aux gémonies sans pitié, pour avoir eu... raison.

Nous sommes curieux de voir le Bashing, phaze II, une fois que les bashers auront été sensibilisés par le tout nouveau livre d’Anderson, “Free! Why $ 0.00 Is the Future of Business”.

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