Home/Interview/Interview de Benoit Lips, Chief Visionary Officer LBi Interview de Benoit Lips, Chief Visionary Officer LBi On ne présente plus Benoit Lips, pionnier de l’Internet en Belgique et fondateur de l’agence interactive DAD. Après 13 années passées aux commandes du vaisseau amiral, l’homme a décidé de se mettre à l’écart de l’opérationnel pour se consacrer à ce qu’il fait de mieux : réfléchir sur le média Internet de demain. Nous l’avons consulté, la boule de cristal entre les mains. 2009-01-08Comment -Inside : Vous venez de troquer votre fonction de CEO de LBi pour celle de CVO (Chief Visionary Officer). Pourquoi ?Benoît Lips :Je désirais depuis un petit temps me dégager des contraintes « day to day » qu’exige une fonction de direction générale. En confiant les rênes de l’entreprise à notre directeur des opérations Stanislas Van Oost, je suis à présent en mesure de me consacrer aux aspects stratégiques du business dans un horizon de 2 ou 3 ans. Les clients sont ainsi assurés de travailler sur des projets à plus long terme. Je n’ai toutefois pas inventé cette fonction. Steve Jobs, patron d’Apple, et Brice Le Blévennec (Emakina) se sont attribués le titre de CVO avant moi (rires).-Une belle occasion de jouer au « faiseur de tendances » …Contrairement à Apple, LBi est une société orientée exclusivement vers les services. Je ne vends pas de machines qui me permettraient d’imposer des tendances sur le marché Internet. En revanche, mon rôle et l’emprise que j’ai sur le marché me permettent d’adapter un certain nombre d’outils technologiques aux besoins de la communication digitale. Nous jouons davantage le rôle de prescripteurs de technologies sans être pour autant un laboratoire. Notre influence est donc limitée : nous n’inventons pas nos outils ni les besoins des clients.-En tant que prescripteur de technologies, vous disposez tout de même du pouvoir d’infléchir les tendances sur le marché Internet …Nous sommes plutôt des passerelles … Je constate que la plupart des clients ont une vision opérationnelle à court terme alors que leurs projets et investissements s’inscrivent davantage dans le long terme (installer une marque, gestion de réseau de partenaires, etc). Mon rôle est donc de concilier ces deux visions en travaillant sur des adaptations qui peuvent nécessiter un peu plus de temps ou qui ont besoin d’un peu plus d’anticipation. Tout le monde sait aujourd’hui qu’il est indispensable de bien analyser l’apport d’une technologie sur l’impact humain et organisationnel avant de déployer l’outil informatique. Sans cela, l’investissement peut mener au fiasco. D’où l’intérêt de réfléchir et d’adapter au mieux l’outil aux personnes qui l’utilisent. Il est bien connu qu’environ 50% des grands projets informatiques n’aboutissent jamais !-La publicité interactive surfe jusqu’à présent sur une excellente vague. Les investissements vont-ils poursuivre leur folle progression dans les années à venir ?La progression des investissements va se poursuivre encore pendant deux ans, et ce indépendamment de la crise.-La crise financière n’a donc aucun effet sur le secteur de l’Internet ?Tous les indicateurs vont dans le sens d’une croissance du secteur, y compris chez LBi où aucun signe de ralentissement ne s’est encore fait sentir. Le marché est sain. Les clients ont aujourd’hui des priorités orientées vers les fondamentaux. Je peux en dire autant en tant que président de l’ACC (Association of Communication Companies). Avec un petit bémol: le secteur avance prudemment car il a tiré les leçons de l’éclatement de la bulle en 2000. En période de crise, les entreprises cherchent moins à travailler leur image de marque et préfèrent poursuivre leurs objectifs commerciaux en dopant les ventes. Pour ce faire, elles n’hésitent plus à transférer leurs budgets publicitaires vers les formats Internet plus abordables, particulièrement puissants pour activer rapidement des campagnes basées sur un mix de formats efficaces lorsqu’il convient de mesurer rapidement les causes à effets d’une campagne. N’oublions pas que l’annonceur doit diffuser son message là où se trouve le consommateur. Aujourd’hui, l’audience poursuit sa progression sur Internet. Le média digital est donc davantage sollicité en période de crise contrairement aux formats offline dont l’efficacité est plus difficile à démontrer. Une tendance qui n’a aucune raison de s’arrêter demain.-N’y aurait-il pas un format publicitaire promis à un plus bel avenir que les autres?La communication sur Internet est une affaire de mix. Je ne dissocie pas le format display de l’e-mail. Pour l’heure, aucun format n’est moribond. Le succès rencontré par le « search engine » depuis quatre années s’explique par plusieurs raisons : il offre le chemin le plus court entre l’investissement et les ventes, l’efficacité de sa mesurabilité, son cout d’acquisition de clients très intéressant. Il est toutefois déraisonnable de penser que l’on pourra inventer constamment de nouveaux formats publicitaires. Nous sommes plutôt condamnés à les voir évoluer en fonction de la taille des écrans et de la manière dont on consomme le média Internet.-Les grandes tendances de l’Internet de demain?Du point de vue de l’annonceur, nous sommes à l’aube de la consommation du média digital. L’arrivée de l’Internet a engendré de nouveaux business modèles et une mutation importante sur le marché de la musique avec l’arrivée d’iTunes et de l’iPod. Le même phénomène va se reproduire dans les cinq années à venir pour la télévision, dernier média publicitaire à fonctionner de manière conventionnelle. En modifiant la chaîne de diffusion de contenu vidéo et en désynchronisant sa consommation, l’Internet permet de faire d’autres choses avec d’autres acteurs. L’écran TV de papa a vécu. La télévision à la demande et l’apparition de nouveaux diffuseurs comme Joost marquent une première étape dans cette évolution …-Avec quelles répercussions pour les annonceurs ?Voilà dix ans que nous assistons à la disparition progressive du média de masse unique par le biais duquel un annonceur pouvait couvrir la totalité du marché (presse quotidienne, TV). Et il n’y en aura plus jamais ! L’Internet a accéléré la fragmentation des canaux de communication. Les annonceurs doivent se résigner à accepter le fait qu’il n’y aura plus de moyen simple et unique de diffuser massivement un message. Et se faire à l’idée qu’il existe désormais une multitude de canaux différents pour faire la même chose. Le niveau de complexité de gestion des campagnes sera à l’avenir de plus en plus élevé et impliquera de nombreuses régies différentes. Il importe donc de trouver des solutions pour faciliter la planification des campagnes média.-La prochaine révolution sur Internet ?La machine à vapeur, l’invention de l’Internet … Tout a déjà été inventé. Les anciens monopoles ont été renversés. Aujourd’hui, les nouveaux acteurs sont positionnés et vont continuer à faire évoluer les technologies. Reste à voir les usages qui en seront faits.-Qu’est-ce qui est « in » sur le média Internet ?Je pense à tous ces outils capables de mettre de l’intelligence dans l’interface et la rendre plus conviviale à utiliser …-Qu’est-ce qui serait désormais « out » ?Le télex, le fax, le wap … (Rires). Non, sérieusement, je ne vois pas.-Doit-on s’attendre à voir perdurer les technologies Web existantes pendant les prochaines décennies?Non. Les technologies obéissent à des cycles. Les logiciels sont adaptés à des types de hardware. On ne peut imaginer qu’ils puissent durer 50 ans ! Il suffit de constater à quel point l’architecture réseau/Internet a récemment modifié les environnements logiciels. Les environnements de développement comme ASP, .Net sont en évolution constante. Aujourd’hui, les développeurs ont à leur disposition des boîtes à outils de plus en plus évoluées qui permettent de réaliser des choses de plus en plus complexes. L’outil technologique n’arrêtera donc pas d’évoluer …-La pub sur l’Internet mobile … Rêve ou réalité ?Certainement pas pour demain, mais pour bientôt. Tout dépend de l’arrivée des abonnements mobiles forfaitaires qui permettraient de démocratiser l’usage de l’Internet « always on ». Tant que ce n’est pas le cas, la pub sur l’Internet mobile restera un business marginal. Néanmoins, je vois l’iPhone plutôt comme un complément de l’environnement digital et non comme une plate-forme à part entière. Une sorte de maillon supplémentaire de la chaîne digitale publicitaire …Propos recueillis par Boris Jancen Newsletter Rejoignez gratuitement la communauté Digimedia et suivez chaque semaine l’actualité Enter your Email address